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Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 17:30
par tuber11
Je confirme les observations de melanocastrine sur le maintien des mycos en naturel malgré des sécheresses répétées.
Dans des terrains très superficiels ou la roche affleure parfois et qui avaient produit beaucoup il y a 20 ou 30ans cette production avait quasiment disparu.
En 2008 avec une pluviométrie favorable la production est réapparu d'une manière convenable.
J'ai été toujours étonné que ces terrains superficiels surchauffés en été puissent produire ce qui dénote malgré tout une grande résistance de la truffe dans des situations extrème.

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 19:10
par stef@
Je vais juste rajouter un truc, la truffe c'est pas automatique 😉
Même dans le sauvage par expérience, y a des zones productrices qui peuvent durer très longtemps et d'autres qui reste éphémères (3/4 ans)
Mais une chose est sûre, le facteur limitant c'est l'eau, pas d'eau pas de truffes (ou très peu)

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 19:21
par stef@
Autre chose tuber 11, très souvent tu trouveras des truffes qui ont résister aux canicules sous la mousse....
Et la mousse c'est le meilleur paillage du monde 😉

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 20:02
par J Gravier
Bonjour à tous,
voici un document pdf que tout producteur devrait lire, il est publié par les Espagnols (fonds Européens) et a destination des planteurs Turks, il est malheureusement en Anglais: https://repositori.udl.cat/bitstream/ha ... sAllowed=y

Colinas, un des auteurs du document, a montré que les conditions idéales pour le développement de mélano (forme végétative), c'était temps frais (c'est relatif) et PF supérieur à 4, il pouvait se "contenter" de "très chaud et sec", humide et froid étant néfaste.
Il faut fouiller dans le doc mais il y fait allusion, ça répond en partie à ta question….

J'ai suivi une plantation en Grèce (nord-est), il fait dans cette région plus chaud que chez nous et il n'y gèle pas l'hiver (ou -1/-2), ils irriguent, la truffière à 5 ans maintenant et ils ont eu quelque truffes la saison dernière, ça répond aussi en partie à ta question….

Sinon Colinas a montré aussi lors d'une conférence (juste après systruffe), que ce qui était bon pour la production de truffe ne l'était pas pour le développement du champignon sur l'arbre, les conditions étant opposées.

Joel

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 20:12
par trufou
bonsoir,
merci joel pour ce resumé bien condensé, et excellent.
mais j ai deja posé la question, peut on sur le long terme concilier jolie production de truffe par un arrosage regulier et vie du champignon sur l arbre, sans parler de taille ?
trufou

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 20:53
par J Gravier
A partir du moment ou pour produire il faut irriguer, mais qu'en irriguant les conditions ne sont plus favorables au maintient du champignon sur l'arbre on est mal….
Il y aura toujours des contres exemples, mais pour moi la règle générale pour une truffière irriguée c'est qu'au bout de 15 ans d'irrigation une truffière est pliée, qu'elle ait commencé à produire à 3 ans ou à 22 ans car j'ai eu les deux cas chez moi.
Il y a une logique dans tout ça, le plus haut lieu de production en conditions de production naturelle a été la région du Ventoux, et le climat c'était quoi à l'époque ?
Climat méditerranéen sec, donc pluies au printemps et à l'automne avec deux périodes de sècheresse, l'hiver et l'été (avec mistral)…. de temps en temps une année pluvieuse, tous les 3/4 ans, et une belle production à la clef….
Eté chaud et sec, hiver frais et sec, conditions parfaites pour le développement du champignon sur l'arbre, plus d'année sèches (sans production) que d'années à pluviométrie importante, du coup la production se maintient des dizaines d'années et le champignon perdure sur l'arbre.

Autre remarque, une truffière irriguée est un milieu "artificiel" ou les arbres se développent sans tenir compte des possibilités du sous sol, par conséquent une sécheresse "accidentelle" a plus de conséquence qu'une sécheresse en milieu naturel.
Je pense qu'une truffe résiste mieux à la sécheresse en milieu naturel (arbres à faible développement et surtout adaptée aux conditions environnementales) que dans une truffière irriguée qui sera très rapidement en condition de stress hydrique.

Joel

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 25 sept. 2019 20:58
par J Gravier
Je n'ai plus de truffières, mais je continue à gérer trois petites parcelles appartenant à un ami de mon père.
Comme elles commencent à vieillir et que je sens bien que la fin est proche, on a tenté une année sans irrigation pour deux d'entre elles, histoire de voir si cela pouvait être favorable au maintient de mélano.
Je reviendrai vous voir en fin de saison 2020/2021, si elles repassent au dessus la barre des 50 Kg/ha il y aura quelque chose à méditer….

Joel

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 06:30
par trufou
bonjour joel,
ca fait plaisir de te relire et de profiter de ta grande experience .

pour les neophytes, ne revez pas, 50 kg /ha chez courant chez joel et une poignée d autres .
pour le commun des trufficulteurs, il faut enlever un zero :lol: :lol: :lol: oui je sais c est mon coté pessimiste !

justement joel en lisant le premier post, je me disais que pour quelqu un qui na pas de foncier, il pourrait ne pas arroser 1 an sur 3 pour essayer de favoriser le champignonau detriment de la fructification.
mais il faudrait de longues années pour avoir la reponse, et encore les autres facteurs ne permettraient pas de l avoir .

ton experience sera interessante, car tu sais faire pousser les truffes comme moi les abricots!

trufou

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 09:33
par jj24
Bonjour,

Merci Joël pour ton partage !

Observations chez moi: Respecter des périodes de sec, 1semaine à 10 jours au printemps (l'alternance période froide, suivie de chaud, puis arrivée de l'eau; est favorable chez moi); 3semaines de sec en été; le but étant de favoriser mélano (ou moins de concurrence);
(Très peu de taille);
JJ24

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 14:51
par J Gravier
Pour favoriser mélano sur les arbres il faut être au dessus de PF=4 et pendant longtemps, tout au moins très régulièrement, il ne s'agit pas non plus de faire souffrir les arbres.
C'est énorme comme stress hydrique, pour atteindre ce niveau de sécheresse dans bien des régions il ne faut pas irriguer, à partir du moment ou il y a production, même en production naturelle, même toute petite production, on est pas dans le maintient de mélano.
Il faut imaginer un champignon qui ne fructifie que de temps en temps, pour assurer la survie de l'espèce, à la faveur d'une année plus humide que les autres, année ou d'autres champignons plus adaptés à l'humidité vont représenter une concurrence et risquent de grignoter de l'espace.
Il n'y a donc pas d'alternative, ou on produit, ou on renforce le statut mycorhizien de l'arbre.
Donc c'est compliqué, c'est encore plus compliqué dans les régions ou les hivers sont humides.
Irriguer par alternance pourrait être une solution, mais si l'année est pluvieuse que faire ? si j'avais mis les truffières au sec l'année dernière j'aurais loupé mon coup, on a eu beaucoup trop d'eau.
Il y aurait plein d'axes de réflexion à avoir en fonction de cette situation.

Par exemple: on sait que suite à une taille l'arbre va refaire des racines dans une fourchette de 2 à 4 semaines, avant même de refaire une pousse (si période de végétation), il faudrait donc éviter d'avoir un sol humide à cette période si on veut favoriser mélano…. c'est à méditer.
Il faudrait conduire les jeunes truffières avec juste l'irrigation nécessaire pour ne pas faire souffrir les arbres.
Sachant que la taille des jeunes plants favorise les divisions racinaires, veiller à ce que cette pousse racinaire coïncide avec une période sèche…. pas évident car peut être que l'arbre va justement attendre l'eau avant de la faire sa pousse…..mais si on arrive à tout synchroniser, d'années en années le statut mycorhizien de l'arbre se renforce jusqu'au moment ou on décide d'irriguer plus pour produire.
Pour produire plus de 50 Kg/ha ce n'est pas compliqué, il suffit d'avoir beaucoup d'arbres très bon producteurs :lol: :lol: , il est même possible d'aller au delà de 100, par contre pour avoir beaucoup d'arbres très bon producteurs c'est plus compliqué et ça ne dure jamais très longtemps….

Joel

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 15:33
par jeanmidu24
Merci Joël.
Comme d'habitude explication limpide qui invite à la réflexion.

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 16:04
par Truffignon30
Merci Joel pour ton retour d'expérience.

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 16:11
par melano
Comme chez nous l'eau est rare, qu'on la met au tuyau et que pour poser 1 m3 il nous faut plus d'une heure, on la dose au plus juste sur le minimum de surface.

En mettant des sondes à différents niveaux dans le sol, je me suis aperçu que durant tout l'été, sous la couche de production à 20 cm de profondeur, mon pF était au dessus de 4 alors qu'à 10 cm, il descendait à 2,3 à chaque arrosage. Sous la zone où sont les truffes, j'ai en limitant la quantité d'eau apportée, maintenu une grande sécheresse.

Or, il y a de grandes chances pour que le racinaire, là où il y a les mycorhizes de mélano soient dans cette zone très sèche.

J'y vois une marge de manœuvre pour concilier les deux. Maintenir racines et mycos dans le très sec et les ascocarpes dans l'humide.

Je précise que cet arbre où sont les sondes a à minima 6 truffes dont une très belle que j'ai vu à la marque.

Cela ne semble pas gêner la production.

En gros, en alternant les années arrosées et sèches comme le fait Joël, il fait une ségrégation temporelle alors que j'ai fais cet été une ségrégation spaciale.

Fred

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 16:53
par tuber01
je ne suis pas certain qu'en descendant en profondeur on trouve bcp de racines fines qui se renouvellent. il faut que je retrouve le chiffre mais de mémoire 90% sont dans les 20premiers cm, et encore plus si l'épaisseur de sol est faible bien sûr.

par contre on peut imaginer alterner sec / humidité dans l'année. à chaque fois où j'ai eu la répétition d'un hiver & printemps sec (jusque tout début juin) puis suivi de pluies suffisantes, l'année était bonne voire excellente. certainement qu'il y a eu renforcement du mycelium et du statut myco d'abord, puis naissance et maintien des truffettes & des truffes. la durée de vie des truffières irriguées est réduite car peut être que le robinet est ouvert trop tot dans l'année...?

bien sûr c'est de la théorie, car c'est compliqué à maitriser, il faut des sols drainants et apporter l'eau ensuite au bon moment.

Seb

Re: mycorhization sur le long terme

Publié : 26 sept. 2019 21:40
par J Gravier
Waooufff, tout est possible….. c'est à vous de réfléchir, en fonction de vos conditions de milieu vous devez tous faire des choses différentes, c'est tout à fait logique et c'est bien pour cette raison qu'en trufficulture on entend tout et son contraire, parce que tout et son contraire restent possible.
Ceci étant dit pour savoir exactement quoi faire il est nécessaire de s'équiper de sondes, un PF de 4 ce n'est pas 3, on travaille sur une échelle logarithmique, donc 4 ce n'est pas une graduation au dessus de 3, il y a un rapport de 10 entre un pf de 3 et 4..... dit différemment, c'est comme si sur une échelle de 1 à 100, 1 restait 1, 2 c'était 10 et 100 c'était 3.
En arbo et en maraichage on utilise beaucoup les sondes watermark, elles ne sont pas adaptées a la trufficulture, elles ne mesurent pas un pf mais peu importe car il serait possible de faire une conversion, le soucis c'est qu'elles décrochent à partir d'un seuil de sècheresse se situant autour de Pf=3.... donc pour aller à 4 il faut aller vers "10 fois plus sec", donc vers "beaucoup plus sec".... ceux qui utilisent ces sondes comprendrons dès lors jusqu'à quel point il faut maintenir du sec pour favoriser mélano, j'en vois déja qui disent waoouff….

Voyez ce qu'a dit Fred, il irrigue la zone ou sont les truffes et dessous il laisse sécher, il a raison, ça peut marcher si comme l'a dit Seb il a des racines fines dans sa zone sèche, mais pour vérifier ça il faut des sondes et faire des trous pour voir s'il y a des racines en profondeur et si elles perdurent dans le temps.
Chez moi ça ne peut pas fonctionner car en dessous de 15cm mon sol ne respire pas assez, il y a trop de limon et d'argile, les pores du sol se colmatent en profondeur à chaque irrigation ou précipitation.
C'est donc un sol qui doit être impérativement travaillé et les truffes ne se trouvent que dans cette zone, en dessous c'est impossible, à l'époque ou je ne griffais le sol que sur quelques cm je n'avais que des truffes de surface, début de saison au 15 oct et fin autour du 20 janvier, maintenant c'est plutôt début décembre à mi février.
Dans mon cas il ne peut pas y avoir de "reserve de champignon" en profondeur, c'est un gros handicap...

J'ai un ami qui a eu une autre idée, irriguer un ensemble de zones avec du goute à goutte, pour faire au plus simple une conduite générale, plusieurs réseaux circulaires et concentriques pour chaque arbre auquel on applique une rotation toutes les années, le but étant d'irriguer des zones différentes.
Ou alors, 4 lignes de goute à goute par rang et dans le sens du rang, un gouteur tous les 1.5m, et toutes les années on tire les tuyaux dans un sens ou dans l'autre pour décaler les gouteurs.

Voilà, ceci étant dit j'ai un gros doute, en général les racines se développent là ou il y a de l'eau et pas ailleurs, donc on risque de se retrouver avec un fort développement racinaire dans les zones humides et pas grand chose ailleurs, exactement le contraire du but recherché… attention aux raccourcis trop faciles ou à la tentation de "théoriser" les pratiques, on oublie très vite que la nature a sa propre logique…. nous on aimerait produire toutes les années et dans la nature c'est quelque chose qui n'existe pas, ou alors pas sur du long terme, comme en plantations irriguées.

Joel